À Djibouti, l’unique chaîne est devenue l’écho du pouvoir

Publié le 16 août 2025 à 10:39

Djibouti : quand le silence devient une politique d’État

 

ÉditorialLe dernier classement de Reporters Sans Frontières (RSF) 2024 place Djibouti 176e sur 180 pays en matière de liberté de la presse. Ce chiffre, brutal, n’est pas une surprise : il est le symptôme d’une stratégie assumée par le pouvoir djiboutien, qui a fait du contrôle de l’information un pilier de sa gouvernance.

 

Une démocratie de façade

 

À Djibouti, les élections se succèdent sans réelle alternance et les médias nationaux ne sont que le relais du discours officiel. La télévision publique, principale source d’information, fonctionne comme un canal de propagande. La presse écrite indépendante a été étouffée depuis longtemps, réduite à quelques publications exilées ou marginalisées. L’absence d’un contre-pouvoir médiatique transforme le pluralisme politique en simple façade.


Criminaliser la critique


Dans ce climat, critiquer la corruption, dénoncer la pauvreté ou interroger les liens financiers avec les puissances étrangères – notamment la Chine, devenue le principal créancier du pays – relève de la témérité. Les journalistes ou blogueurs qui s’y risquent sont arrêtés, parfois jugés pour diffamation, « atteinte à l’unité nationale » ou menaces contre la sécurité de l’État. Ces accusations floues permettent de criminaliser la critique, tout en entretenant un climat de peur.

 

Une chape de plomb qui coûte cher

 

La politique du silence a un prix. Elle fragilise la confiance des citoyens envers leurs institutions, mine la transparence des finances publiques et limite l’attractivité économique du pays hors des projets portés par ses alliés stratégiques. Elle expose aussi Djibouti à une dépendance croissante vis-à-vis de bailleurs étrangers, dans un contexte régional instable.

 

Le choix du contrôle

 

Le gouvernement djiboutien n’ignore pas les critiques. Mais au lieu de voir la presse comme un contre-poids utile, il choisit la voie du contrôle absolu. Cette stratégie peut offrir une stabilité apparente, mais c’est une stabilité fragile, construite sur l’étouffement des voix discordantes.

 

 

À l’heure où Djibouti aspire à jouer un rôle central sur la scène africaine et internationale, maintenir la presse sous verrou revient à se couper de sa propre société. Le véritable signe de force pour un État n’est pas de réduire ses journalistes au silence, mais de leur permettre d’exister.

 

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