Par @DNL_News Actualités
Djibouti, 2025 — En 2024, Djibouti est entré dans l’histoire scientifique en devenant le premier pays d’Afrique de l’Est à autoriser la libération en milieu naturel de moustiques génétiquement modifiés (OGM), dans le cadre d’un programme pilote avec la société britannique Oxitec. L’objectif : éradiquer Anopheles stephensi, un moustique urbain invasif, porteur du paludisme et résistant aux insecticides. Si cette approche biotechnologique est saluée par certains comme une avancée majeure, d’autres y voient une expérimentation à hauts risques, fondée sur des preuves encore fragiles.
Une solution de rupture… mais à double tranchant .
Les moustiques OGM développés par Oxitec sont exclusivement des mâles, génétiquement conçus pour transmettre un gène létal à leurs descendantes femelles. Ne piquant pas eux-mêmes, ces mâles doivent réduire la population des moustiques vecteurs de maladies.
Mais les résultats issus d’expériences menées ailleurs posent question. Au Brésil (2013–2015), une étude a révélé que les moustiques OGM s’étaient croisés avec les moustiques sauvages, créant une descendance hybride inattendue et viable. Ce phénomène pourrait donner naissance à des moustiques plus résistants, contredisant les prévisions de stérilité.
Des effets écologiques imprévisibles .
Oxitec utilise un gène dépendant de la tétracycline, un antibiotique qui empêche les moustiques modifiés de survivre à l’état sauvage. Cependant, des études ont montré que cet antibiotique est présent dans certains environnements urbains et agricoles, rendant le système de contrôle moins fiable. Des moustiques OGM pourraient ainsi survivre et proliférer dans des zones non prévues.
Autre effet observé au Brésil : l’espace laissé par la diminution de Aedes aegypti a permis à Aedes albopictus, également porteur de virus, de se développer davantage. Une telle dynamique pourrait aggraver les risques sanitaires.
Un rejet ou un abandon dans plusieurs pays .
Malgré les promesses de cette technologie, plusieurs pays ont rejeté ou arrêté les projets Oxitec :
• Californie (États-Unis) : face à une opposition publique et politique, Oxitec a retiré sa demande de libération en 2023.
• Îles Caïmans : après des essais initiaux dès 2009, les autorités ont mis fin au projet en 2018, invoquant un manque de transparence et d’efficacité démontrée.
• Malaisie : des essais ont eu lieu, mais les autorités n’ont pas validé de déploiement à grande échelle.
• Australie (Queensland) : en 2025, plus de 7 500 citoyens ont signé une pétition contre le projet de moustiques OGM ; le gouvernement a mis le dossier en attente.
• Europe (en général) : à ce jour, aucune autorisation de déploiement en milieu naturel n’a été délivrée sur le continent, en raison des exigences strictes en matière de biosécurité.
Ces décisions montrent que des pays, y compris technologiquement avancés, préfèrent appliquer le principe de précaution en attendant plus de preuves scientifiques et de garanties sur l’innocuité de la technologie.
Et à Djibouti ?
Si la situation sanitaire nationale justifie l’exploration de solutions innovantes, l’introduction de moustiques OGM doit s’accompagner d’un suivi rigoureux, de recherches locales indépendantes et d’un véritable dialogue citoyen. Or, à ce jour, aucune étude spécifique au contexte djiboutien n’a été rendue publique, et peu d’informations ont été communiquées à la population.
L’introduction de moustiques génétiquement modifiés peut paraître prometteuse dans la lutte contre le paludisme. Mais les expériences internationales montrent que cette technologie n’est ni maîtrisée ni sans risques. Le fait que plusieurs pays l’aient rejetée ou abandonnée doit interpeller. Pour Djibouti, la prudence, la transparence et la recherche scientifique locale doivent primer afin de garantir une stratégie de santé publique durable et sécurisée.
SOURCES : https://www.nature.com/articles/
https://www.technologyreview.com/2020/08/20/1007221/gene-drive-mosquitoes-disease-malaria-oxitec/
https://www.infogm.org/7763-californie-abandon-essai-moustiques-ogm-oxitec
https://www.independentsciencenews.org/news/oxitecs-failed-gm-mosquito-releases-worldwide/
https://www.sciencemag.org/news/2010/11/malaysian-trial-gm-mosquito-raises-hope-and-fear
@DNL

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